L’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique : la reconfiguration d’un ordre mondial sous l’effet des politiques de Trump
L’ère Biden a été marquée par une intensification des sanctions contre la Russie, notamment dans le domaine énergétique. Avec le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, le monde s’apprête à voir une transformation des rapports de force. Entre la soumission de l’Europe, les enjeux palestiniens et la lutte d’influence en Afrique, les dynamiques géopolitiques actuelles redessinent un nouvel équilibre mondial.
L’Europe entre soumission et basculement vers la Chine
L’administration Biden a imposé des restrictions sévères contre la Russie, dont l’interdiction des achats de pétrole en dollars, visant à affaiblir l’économie russe et limiter ses capacités militaires. Cependant, ces sanctions ont eu un effet secondaire : elles ont accéléré la fragmentation des marchés énergétiques mondiaux. La Chine et l’Inde, profitant de la situation, achètent désormais du pétrole russe à prix réduit en monnaies alternatives.
L’Europe, déjà fragilisée par la crise énergétique résultant de la guerre en Ukraine, se retrouve dans une position délicate. Ses alliés américains lui imposent des restrictions qui nuisent à son économie, tandis que ses besoins énergétiques l’exposent à une dépendance accrue à de nouveaux partenaires. L’arrivée de Trump pourrait accentuer cette situation. Ayant déjà montré, lors de son premier mandat, une volonté de désengagement en Europe, Trump pourrait chercher à imposer des conditions encore plus dures à ses alliés européens.
Son objectif ? Soumettre l’Europe en la contraignant à renforcer son alliance avec Washington sous des termes plus favorables aux États-Unis. Toutefois, une soumission excessive pourrait avoir l’effet inverse : si l’Europe se sent prise au piège par les États-Unis, elle pourrait se tourner vers la Chine, qui se positionne comme un acteur économique alternatif offrant une plus grande souplesse et des partenariats moins contraignants. En cherchant à asseoir son autorité, Trump pourrait donc involontairement pousser l’Europe dans les bras de Pékin, une conséquence paradoxale de sa politique transactionnelle.
Le Moyen-Orient : une opportunité stratégique pour Trump
Trump, connu pour son pragmatisme, pourrait chercher à renforcer ses alliances avec les puissances du Moyen-Orient, en particulier l’Arabie saoudite. L’objectif de Mohammed Ben Salmane (MBS) étant de mener l’Arabie saoudite vers une puissance régionale incontestée à l’horizon 2030, Trump pourrait lui offrir une concession symbolique sur la Palestine, et plus précisément sur la Cisjordanie, en échange d’un partenariat renforcé, alors que Gaza est aujourd’hui réduite en ruines.
Ce plan pourrait prendre la forme d’une reconnaissance limitée d’une entité palestinienne, sans réelle souveraineté, mais suffisante pour permettre à MBS d’améliorer son image auprès du monde musulman. Un tel accord renforcerait la normalisation d’Israël avec le reste du monde arabe, rendant le plan d’Abraham bien plus réalisable.
Au-delà des questions diplomatiques, le Moyen-Orient reste un acteur clé dans l’approvisionnement énergétique mondial. Trump pourrait ainsi chercher à s’appuyer sur MBS pour contrôler les ressources pétrolières et limiter l’influence chinoise et russe dans la région. Dans ce scénario, la Chine et la Russie perdraient du terrain, consolidant ainsi la mainmise américaine sur le Moyen-Orient.
L’Afrique : l’arène des nouvelles rivalités géopolitiques
L’Afrique, riche en ressources naturelles et en croissance démographique, est devenue une zone de compétition féroce entre les grandes puissances. La Russie, affaiblie par les sanctions occidentales et par l’instabilité interne de Wagner, voit son influence se réduire. Si certains pays africains avaient bénéficié du soutien militaire russe, beaucoup cherchent aujourd’hui à diversifier leurs partenaires pour ne pas devenir trop dépendants de Moscou.
De son côté, la Chine fait face à des résistances croissantes. Sa stratégie d’investissements massifs en infrastructures via des prêts a engendré des niveaux d’endettement préoccupants pour plusieurs pays africains. Face à cette situation, des gouvernements remettent en question leurs liens avec Pékin, tandis que des mouvements anti-chinois émergent, dénonçant le manque d’emplois locaux et l’exploitation excessive des ressources.
L’entrée en scène de nouveaux acteurs comme le Maroc et la Turquie, proposant des partenariats plus équitables, met Pékin en difficulté sur certains marchés africains. L’Afrique devient ainsi le théâtre d’une redistribution des influences, où l’Europe et les États-Unis cherchent également à renforcer leur présence face à la Chine et à la Russie.
Le Maroc, pivot stratégique en Afrique
La reconnaissance du Sahara marocain par la France marque un tournant diplomatique majeur. En soutenant la souveraineté du Maroc sur cette région, Paris consolide une alliance avec un pays perçu comme un acteur clé pour la stabilisation du Sahel et les échanges économiques avec l’Afrique subsaharienne.
Le Maroc, grâce à sa position géographique et à ses infrastructures modernes, s’affirme comme la principale porte d’entrée vers l’Afrique. Cette centralité lui permet d’attirer les investissements et de jouer un rôle crucial dans les échanges entre l’Europe et l’Afrique.
L’importance stratégique du continent africain ne cesse de croître. Avec une large part des métaux rares indispensables à la transition énergétique mondiale et un marché en pleine expansion, l’Afrique devient un levier incontournable pour les puissances cherchant à asseoir leur domination.
Les États qui réussiront à s’imposer en Afrique bénéficieront d’un avantage stratégique décisif :
Un accès privilégié aux ressources critiques,
Un marché en pleine croissance,
Une influence politique accrue dans les instances internationales.
Les infrastructures africaines, notamment celles reliant l’Atlantique au Moyen-Orient via le Sahara occidental, pourraient également servir de vecteurs commerciaux majeurs, renforçant ainsi la position des pays contrôlant ces routes.
Vers un nouvel équilibre mondial ?
L’analyse des dynamiques actuelles tend à confirmer une redistribution des alliances et des rapports de force mondiaux. Les sanctions de Biden ont modifié le paysage énergétique, entraînant une fragmentation des marchés. Trump, avec sa politique transactionnelle, pourrait précipiter l’Europe vers la Chine en cherchant à la soumettre. Au Moyen-Orient, la convergence entre les intérêts américains et saoudiens pourrait remodeler la question palestinienne et affaiblir la Russie et la Chine. L’Afrique, au cœur de la compétition mondiale, devient un enjeu stratégique majeur, avec le Maroc en première ligne. Dans cette lutte d’influence, le pays ou le bloc qui parviendra à dominer l’Afrique disposera d’un levier stratégique sans précédent, redéfinissant ainsi l’ordre mondial des prochaines décennies.